Nana naquit en l’an deux-milles-vingt-cinq pendant une matinée brumeuse. Ses parents, Kokoro et Lele furent bien heureux d’avoir une deuxième fille en santé dans la famille. Sa grande sœur, Katara, avait à peine cinq ans de plus qu’elle et même avec son âge aussi bas, elle s’était donnée comme mission de toujours s’occuper de sa petite sœur. Les deux jeunes filles eurent une relation fraternelle belle et puissante. Cependant, lorsque Nana découvrit son Alter pour la première fois, ses parents furent immédiatement inquiets. Pouvoir recréer absolument n’importe quel objet non-vivant était une bénédiction, mais cela comportait des risques énormes. Le père et la mère craignaient énormément que si leur entourage apprenait que leur fille possédait un tel pouvoir, ils se mettraient à la manipuler pour leurs propres biens. Elle pouvait théoriquement recréer une quantité infinie de Yens, tant qu’elle apprenait la composition de cette monnaie. De ce fait, la famille de Nana, cette dernière comprise, durent cacher la vérité en prétendant que Nana n’avait que la capacité de créer des objets faits en bois… et rien d’autre.

C’était dommage car Nana aimait bien son Alter, il était rigolo, mais ses parents furent extrêmement stricts sur son utilisation. Tout ce qu’ils voulaient était de protéger leur fille et bien entendu la jeune enfant comprenait, mais cela la frustrait malgré tout. Elle voulait pouvoir montrer à tous ses amis de l’école qu’elle pouvait fabriquer un avion en papier en un tournemain, mais ne pouvait pas. Ses parents lui interdirent même de tenter de créer quoi que ce soit d’autre que du bois, par peur de révéler son vrai pouvoir. De ce fait, le potentiel de Nana en fut grandement atteint pendant toute son enfance. À dix ans, elle ne pouvait rien créer autre que des objets en bois et cela la frustrait énormément, mais elle savait que c’était pour son bien… ou du moins elle l’espérait.


Heureusement, sa grande sœur était toujours là pour lui remonter le moral. Ce fut même elle qui la convainquit de rejoindre une école de super héros. Bien entendu les parents de la principale intéressée refusèrent catégoriquement, ce qui créa beaucoup de disputes et de tensions pendant au moins un an. Cependant, Katara usa encore une fois de son super pouvoir de grande sœur pour FINALEMENT convaincre ses parents que c’était la seule façon pour Nana de se protéger elle-même. Les parents comprirent qu’ils ne pourront pas protéger leur enfant pour toujours et qu’un jour où l’autre, elle devra vivre d’elle-même et même si cela les terrifiait, la meilleure façon pour que Nana ne se fasse pas exploiter était qu’elle fasse partie de la justice.

Du coup, lors des quinze ans, Nana réussit (de justesse) à être acceptée dans une école de super héros. Ce fut de peu car à cause de toute son inexpérience, l’adolescente avait très très peu d’expérience avec son alter, ne pouvant que matérialiser des objets en bois. La principale raison pour laquelle elle fut acceptée était sa condition physique presque parfaite. Encore une fois elle se devait de remercier sa grande sœur qui avait dévoué la majorité de sa vie à la nage de vitesse et donc connaissait le parfait programme d’entraînement pour permettre à Nana d’avoir une très bonne forme physique. Même si son alter n’était presque qu’au point zéro, au moins elle était terriblement athlétique.

Vous savez, dans toutes les bonnes histoires, une tragédie survient. Dans celle-ci, c’est à ce moment précis qu’elle arrive. À peine quelques semaines après le début de sa première année scolaire, Nana reçut un appel de ses parents. Katara, sa grande sœur, partenaire, amie et confidente, venait de mourir. Une histoire tellement stupide, elle avait été au mauvais endroit au mauvais moment lors d’une poursuite entre héros et vilains. Elle avait été utilisée comme bouclier humain par l’un des malfrats et, vous l’aurez deviné, rien ne se passa comme prévu. Les coupables furent appréhendés la nuit même, mais le mal était fait…

Tout le monde ou presque sait à quoi peut ressembler le deuil de la perte d’un parent proche. Katara était trop jeune, trop pure, trop pleine de potentielle. Nana fut dévastée, et c’était un euphémisme. Cependant, au bout de quelques semaines à pleurer toutes les larmes de son corps, Nana se rendit compte que sa grande sœur n’aurait pas voulu qu’elle finisse dans cet état. C’était grâce à ses encouragements si Nana avait trouvé ce qu’elle voulait faire plus tard. C’était grâce son entraînement si Nana avait réussi à se faire accepter dans une école héroïque. Une partie de Katara était et sera toujours dans le cœur de sa petite sœur, c’est donc pour cela que l’apprentie héroïne se jura de devenir l’une des meilleures de son domaine. Elle fera tout en son pouvoir pour éviter que ce qui venait de lui arriver ne se reproduise chez aucune une autre famille.


De retour à l’école, prête à en découdre et à travailler sans relâche, Nana s’entraîna comme une dingue et prit ses études d’un sérieux presque malsain. On pouvait dire qu’elle noyait son chagrin dans ses études, ce qui était mieux que l’alcool, mais cela devint inquiétant. Chaque seconde à ne pas étudier, ne pas s’entraîner ou ne pas devenir la meilleure était du temps perdu. Heureusement, lorsque la deuxième année d’études commença, sa colère, sa tristesse et sa dépression avaient diminué, mais ce n’était plus la même Nana qu’il y a un an. Elle avait pris beaucoup de centimètres, avait une forme athlétique remarquable et connaissait à la perfection la composition atomique de plusieurs centaines d’objets différents. L’école à laquelle elle s’était inscrite était bien ordinaire, ni prestigieuse ni miteuse, dans la moyenne des écoles héroïques, mais la jeune élève était dans le top de sa classe. C’était une bonne chose… sauf qu’elle était également devenue aigrie, sérieuse et même colérique. Elle avait fini par se donner trop de pression pour être la meilleure dans tous les domaines de ses classes. Elle avait peu d’amis et passait le plus clair de son temps à juste… étudier, devenir meilleure.


Cela ne changea pas vraiment lors de sa troisième année… jusqu’au jour de l’accident. En effet, lors de son stage de troisième année qui la dirigerait vers son diplôme pour enfin devenir une héroïne, la jeune Nana fut victime d’un accident de bateau. Plus précisément, elle se fracassa lourdement la tête sur la coque d’un navire, provoquant une commotion cérébrale sévère. Deux mois à l’hôpital. Deux mois sans signe d’amélioration. Ses parents étaient dévastés. Heureusement, elle finit par se réveiller, au grand bonheur de sa famille et de ses camarades de classe. Cependant, quelque chose avait changé en elle.


Dès lors de son réveil, la jeune femme se sentit… légère, moins froissée, comme si un énorme poids s’était libéré. Le médecin lui expliqua à elle et ses parents qu’elle n’était pas sortie de son coma sans répercussion. En effet, le choque causé par le navire avait endommagé de façon permanente une partie de son cerveau. Plus précisément la région s’occupant de la colère. L’équipe médicale expliqua que Nana était dorénavant incapable d’éprouver une quelconque forme de colère. Pas de haine, de frustration, son niveau de stresse était même rendu près de zéro. Nana fut pour le moins confuse. Depuis les deux dernières années, les seules émotions que Nana possédait n’étaient que chagrin, amertume et haine. Maintenant, elle était… incapable de comprendre ce qu’elle ressentait.

Après quelques mois de rétablissements, Nana put enfin sortir de l’hôpital, terminer ses études et recevoir son diplôme. La dorénavant acolyte (qui se transforma rapidement en héroïne) n’était plus la même personne et… cela lui fit plaisir. Depuis, le souvenir de sa sœur, auparavant accompagné de regret, était maintenant source de belle nostalgie. Elle avait toujours le même objectif, devenir l’une des meilleures héroïnes du siècle, mais cette fois, elle voyait plus clair, comme si un nuage rouge s’était évaporé de son champ de vision.

Les années qui suivirent furent révélateur pour l’héroïne en herbe, mais cela coupa dur lors de la Trahison en deux-mille-quarante-cinq, à peine deux ans après son diplôme. L’ère des héros était dorénavant chamboulée, fragile. Chaque action comptait, mais Nana ne se découragea pas. Elle savait au font d’elle que tout finirait par se replacer. Après tout, elle était maintenant reconnue pour son positivisme légendaire. Bien sûr l’absence totale de colère n’avait pas QUE des bénéfices, mais Nana ne pouvait s’empêcher de se dire que ce jour-là, sa sœur avait provoqué tout ça.

En deux-milles-quarante-huit, donc deux ans après la Trahison, Nana fut contactée par la seule et unique River, directrice de Daiki. L’ex top cinq proposa à Nana de devenir professeur à son école. Une place en Évolution de l’Alter venait de se libérer et elle avait entendu grands biens de la jeune héroïne. River raconta qu’elle eut ouïr du chemin que Nana avait emprunté et expliqua à cette dernière qu’elle cherchait des perles comme elle pour enseigner à la nouvelle génération. Des gens qui ont dû traverser mille et un obstacles pour atteindre leur objectif, tout comme elle. Nana accepta sans hésitation, extrêmement excitée par cette occasion en or. Appréciée des élèves, il ne lui fallut que deux ans pour être promue professeure titulaire.

Aujourd’hui, vingt-cinq ans au compteur, Shishibi Nana entra dans la classe de troisième année, une bouteille de thé glacée dans la main, une barre énergisante dans l’autre et une pomme à moitié croquée dans sa bouche. La professeure titulaire s’assit à son bureau, observant ses élèves entrer un par un. Certains la saluèrent, d’autres posèrent un simple regard. Au son de la cloche, un sourire se dessina sur son visage tandis que le président de la classe ferma la porte. Le brouhaha s’effaça lentement pendant que Mama Ammo popa une craie blanche et commença à écrire son nom complet suivi d’un soleil et un cœur plus ou moins bien dessiné. Une belle journée s’annonça… ainsi qu’une excellente année, et un futur plein de potentiel.