La famille Takagi, qui vivait au nord de l'île d'Honshu, se composait du père, Kano: un pêcheur traditionnel qui passait le plus gros de sa vie en mer et qui était plus que satisfait d'avoir deux garçons pour l'accompagner le week-end, Tomeo et Keiji; ainsi que la mère, Minako, qui travaillait à mi-temps en tant qu'assistante en boulangerie et s'occupait du foyer l'autre partie du temps. C'était une famille très traditionnelle, loin d'être extravagante puisque leurs revenus étaient moyens et que les Alters présents étaient très discrets. Si la mère n'avait pas d'Alter, le père était fier d'avoir transmis ses gênes à ses deux fils. Il pouvait sécréter des substances paralysantes et anxiogènes et ne s'en servait quasiment que pour la pêche. Keiji hérita du même Alter tandis que Tomeo découvrit une immunité face à tout type de corps étranger, aussi bien physique que mental, après avoir été grondé par son père à l'âge de trois ans. L'homme avait un tempérament plutôt explosif et n'était pas très à l'aise avec le rôle de père. Il avait un jour puni le jeune Tomeo à l'aide de ses fameuses substances ce qui, premièrement le fit hurler à la mort face à toutes les visions d'horreur qu'il avait pu voir et contre lesquelles il était totalement sans défense, ne pouvant bouger. En second, cet évènement déclencha une immunité quasi totale de son corps, ce qui déçut légèrement le père. Non parce qu'il ne pourrait plus le punir, il s'en voulut pour toujours d'avoir infligé une telle souffrance à son fils, même si l'enfant ne s'en souviendrait sûrement pas vu l'âge qu'il avait, mais parce que cet Alter était tout simplement inexploitable. C'était comme s'il ne disposait pas d'Alter pour lui, et on constatait pour cette raison souvent une préférence pour Keiji, l'aîné, qui hérita de l'Alter paternel. Néanmoins Tomeo était tout aussi doué en pêche puisqu'il pouvait utiliser les appâts fabriqués par son père et son frère et cela ne changeait rien au quota quotidien. Cette substance était une louange pour la famille car elle attirait les gros poissons et n'avait pas d'effets indésirables sur les personnes qui mangeaient le poisson attrapé. Il y avait aussi le grand-père maternel qui vivait avec eux et qui, dans sa jeunesse, était réputé pour être un très bon forgeron traditionnel. Il lui arrivait de temps en temps de fabriquer  des bricoles pour le village mais n'exerçait plus tant que ça, si bien qu'il finit par léguer son matériel à Tomeo lorsqu'il annonça qu'il ouvrait son atelier sur Tokyo. Keiji était d'ailleurs le premier à partir pour la capitale à l'âge de 15 ans car, avec son Alter qui pouvait s'avérer utile en tant que superhéros, il avait réussi à intégrer Yuei, une école de superhéros. Ce n'était pas le cas de Tomeo qui avait raté le concours d'entrée, considéré tout simplement comme un simple homme sans réel potentiel. Il l'avait mal pris car il était très intéressé par la filière assistance et une grande frustration se forgea alors sur l'utilité de son Alter. Néanmoins, croyant au destin et à la manière dont s'obtiennent les choses, il se lança pour objectif de devenir malgré cela ce qu'il voulait être, et cela par lui-même. Son grand-père lui aida en matière de forge en lui enseignant tout ce qu'il savait, tandis qu'il apprit tout de la cordonnerie, de la chaudronnerie et de la menuiserie dans les livres et auprès des aïeuls du village. Il observa les équipements que possédaient les superhéros dans les magazines et s'en inspira pour fabriquer les siens avec le matériel disponible. Très rapidement, il sentit que ce métier devenait une passion et des villageois aux alentours avec quelques besoins venaient chez lui pour quelques des demandes liées à leur Alter. Meule pouvant être entraînée avec un bras de pierre, maniques servant de plaques de cuisson, et bien d'autres outils domestiques que l'on ne pouvait trouver en magasin car spécifiques à certains Alters.

C'est alors à l'âge de 18 ans qu'il partit pour Tokyo après avoir accumulé assez d'expérience et d'assurance pour ouvrir son atelier ouvert aux demandes professionnelles et particulières. Il aurait pu vivre avec son frère mais les deux jeunes hommes n'étaient pas compatibles, il y avait facilement des tensions qui se créaient entre eux. Restant toutefois une famille, Keiji prêta de l'argent à Tomeo pour ses débuts   qui pouvaient être difficiles les premiers mois, le temps qu'il se crée une réputation et une clientèle. Ces premiers mois étaient d'ailleurs les plus exténuants pour le jeune mécano-cordo-forgeron puisqu'il n'avait pas vraiment d'expérience directe avec du matériel de superhéros et les nombreux retours sur ses premiers essais étaient très instructifs. S'il ne dormait pas, il était forcement à l'atelier, et s'il dormait... Il y avait des chances que ce fut à l'atelier aussi, car même s'il n'y avait qu'un étage à monter pour aller dans son appartement, la fatigue était telle qu'il s'endormait sur son établi. Finalement la persévérance paya et le voilà âgé de 26 ans, bénéficiant d'une expérience en matériel de superhéros plutôt bonne et une volonté de progresser et de satisfaire toujours plus grande. Il y a eu certes une période dure 5 ans plus tôt mais Tomeo essaie de ne pas évoquer cet évènement où il a été comme tous, très déçu, mais sa confiance envers les superhéros ainsi qu'envers les justiciers a toujours été sans égale.

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Une porte s'ouvre, le tintement d'une clochette se fait entendre. Ses yeux intensément intrigués par l'objet entre ses mains se retournent vers l'individu venant d'entrer. Un bleu éclatant, transperçant même, analyse l'invité des pieds à la tête pour finalement se figer dans un croisement de regard, chaleureux aussitôt qu'un grand sourire décore le visage du grand forgeron.

"Bienvenu dans l'atelier Takagi !" dit-il avec entrain

Il range sur une étagère le boîtier qu'il tient entre ses mains pour poser son avant bras sur le comptoir qui lui sert d'établi, affichant toujours un grand sourire.

"Je vous écoute..."

Pas de réponse. Et pourtant l'individu affiche un air déterminé sur son visage. C'est comme s'il savait ce qu'il voulait mais n'avait pas les mots pour s'exprimer, pour le moment. Arquant un sourcil face au silence devenant pesant, Tomeo s'apprête à reposer sa question mais aussitôt le potentiel client fait un mouvement de la main, dessine un signe du bout des doigts qu'il envoie vers le forgeron. Le silence se poursuit. Ce n'est pas la langue des signes. Tomeo perçoit aussitôt une odeur de soufre qu'il connaît si bien, l'individu essaie de brouiller ses perceptions. Il recule d'un pas et prend d'assaut en main une masse faisant presque sa taille.

"Je vous préviens, cela n'a pas d'effet sur moi. Et je retire ce que j'ai dit, vous n'êtes pas le bienvenue ici. Quittez mon atelier, sur le champ."

L'individu ôte sa capuche et laisse apparaître une chevelure blanche assez atypique pour un visage aussi jeune. Il doit avoir la vingtaine. Un anneau décore une de ses oreilles et son visage aussitôt impassible rend au forgeron le sourire qu'il lui a adressé plus tôt.

"Excusez-moi pour cette frayeur, j'ai pour habitude d'être discret et d'effacer mon visage de la mémoire des gens qui me voient. Mais permettez-moi de me présenter, Haku.

- Original comme habitude... Mais passons. Je vais devoir vous redemander... Que puis-je faire pour vous?

- Et bien... Il me faudrait une nouvelle tenue de superhéros, j'aimerais notamment avoir plusieurs glyphes bien précis dessinés dessus. Notamment un capable de dissimuler un flingue.

- Hmmm très bien, je peux reproduire des glyphes sur des vêtements... Après vous faites ce que vous voulez avec. Mais je vais devoir vous demander votre permis de superhéros pour cette commande.

- Ca va être problématique..."

La même odeur de soufre retentit aussitôt et un silence s'accompagne d'un affrontement de regards. Tomeo relâche alors sa masse qu'il laisse tomber sur le sol, provoquant un lourd bruit de métal.

"Je te l'ai déjà dit, cela ne fonctionne pas sur moi. Mais j'ai une règle dans mon atelier et c'est la même pour tout le monde. Je sers tout les types cools, mais pour les deals chelous comme ça. Soit t'es un superhéros, soit...

- C'est bon j'ai compris je me taille.

- Soit tu me ramènes une tête pour me montrer que t'es un justicier ou un mercenaire. T'auras peut-être une réduc si tu ramènes une grosse prime."

Le regard aussi pur et accueillant a changé d'allure, le regard froncé et la mine grave donne une teinte plus sombre aux pupilles du forgeron, faisant comprendre à n'importe qui qu'il ne fallait pas essayer de lui planter un couteau dans le dos. Haku relève aussitôt le regard, il a peut-être ses chances finalement pour avoir ce qu'il veut. Et comme pour faire comprendre son message, Tomeo ajoute:

"Je suis pas là pour aider les criminels à se la jouer, c'est pour ca que je parais peut-être intransigeant, mais j'ai des principes. Allez, à plus !

- Très bien, je te ramène ça."

Le forgeron fait une frappe sur l'épaule du potentiel nouveau client puis lui envoie un dernier sourire car il préfère toujours rencontrer et quitter ses clients sur une bonne impression.